Nouvelle fracture dans le dialogue social : l’U2P, qui représente 3 millions d’entreprises de proximité, quitte les négociations sur les retraites. Son président critique un manque de pragmatisme et plaide pour une approche réaliste, sans concessions démagogiques. Michel Picon affirme qu’il faut cesser « d’illusionner les Français » sur la nécessité de travailler plus longtemps.
Une nouvelle rupture dans le dialogue social. L’Union des entreprises de proximité (U2P), qui représente 3 millions d’adhérents, a décidé de quitter les négociations sur la réforme des retraites engagées par le gouvernement avec les partenaires sociaux. Michel Picon, président de l’U2P, justifie cette décision par un « concert d’agressions » ayant suivi les déclarations de François Bayrou sur l’impossibilité d’un retour à 62 ans comme âge légal de départ.
Michel Picon affirme que ce choix est « le fruit d’une réflexion » et déplore une absence de volonté réelle de traiter les enjeux de fond : « Si personne ne veut bouger ce qui est essentiel, c’est-à-dire la borne d’âge, tout cela rend ces travaux complètement caducs. Nous en avons assez des gazouillages de couloirs et des petites phrases sur les plateaux télé, il faut un débat sincère et sérieux. »
« Il faut arrêter d’illusionner les Français »
L’U2P, première organisation patronale à quitter ces discussions, estime que le maintien à 64 ans est une nécessité et qu’il faudra même, à terme, envisager un relèvement de l’âge de départ, sauf pour les métiers les plus pénibles. « Qui peut dire le contraire ? Tout le reste, ce sont des circonvolutions auxquelles nous ne voulons plus nous prêter », martèle Michel Picon.
L’organisation patronale critique également l’impact financier d’un retour à 62 ans, qui, selon elle, conduirait à un « effondrement du régime de retraite ». Elle mentionne à ce titre les 51 milliards d’euros d’intérêts versés en 2024 pour la dette et les projections de la Cour des comptes, selon lesquelles la réforme de 2023 creuserait un déficit de 30 milliards d’euros d’ici 2045.
Une rupture définitive ?
La décision de l’U2P de quitter la table des négociations est « définitive », sauf si « demain on nous disait vraiment qu’on recommence une réunion avec un peu de loyauté et de sincérité », précise Michel Picon. Mais il se dit sceptique face aux positions de certains groupes politiques qui « s’accrochent à l’idée de revenir à 62 ans ».
« Le bateau France est en train de prendre l’eau et l’orchestre des partenaires sociaux continuerait de jouer comme si de rien n’était ? L’U2P s’y refuse », conclut Michel Picon.
De son côté, Jean-Christophe Repon, président de la Capeb et vice-président de l’U2P, insiste sur la nécessité d’ une meilleure prise en compte des carrières longues, notamment via l’apprentissage et les reconversions, à l’image des grands sportifs. Il insiste sur la prévention de l’usure professionnelle, soutenue par le FIPU, prioritairement destiné aux TPE. Il a rappelé que si l’U2P a soutenu le passage progressif à 64 ans de l’âge légal de départ en retraite, ce n’était pas avec enthousiaste mais c’était par pragmatisme considérant que la modification des autres paramètres de pilotage de notre système de retraite aurait eu des effets plus pénalisants encore.
Dominique PARRAVANO