Alors que le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’Économie circulaire sera définitivement adopté par le Parlement le 30 janvier, la Capeb déplore que ses propositions relatives à la gestion des déchets du bâtiment n’aient pas été entendues. Ainsi, son souhait et celui de la filière de proposer un système équivalent ou alternatif à la mise en place d’une REP (Responsabilité Élargie du Producteur) n’a pas été retenu, en dépit des promesses faites par le Gouvernement.
Le secteur du bâtiment sera soumis à une filière REP de gestion de ses déchets, chapeautée par un ou plusieurs éco-organismes, à compter du 1er janvier 2022. Les industriels devront ainsi financer non seulement la fin de vie des matériaux qu’ils mettent sur le marché, mais également l’extension des horaires d’ouverture des structures recevant les déchets, le déblaiement des dépôts sauvages et la reprise gratuite des déchets triés du bâtiment, des particuliers comme des professionnels. Cette mise en place de la REP a toujours été contestée par la Capeb et l’ensemble de la profession.
La filière a estimé que la mise en place de la REP conduirait à une augmentation du prix des matériaux de construction comprise entre 8 et 10 %. Cette hausse des coûts serait insupportable pour les maîtres d’ouvrage et en totale contradiction avec la volonté des pouvoirs publics de diminuer les coûts de la construction.
Alors que l’Etat a récemment confié une étude de préfiguration à l’ADEME dont les objectifs sont uniquement de poser les grands principes de fonctionnement de la REP sur les déchets du bâtiment, la Capeb s’étonne donc que la possibilité de proposer un système équivalent qui serait ensuite approuvé ou non par l’Etat ait été retirée du projet de loi.
Patrick Liébus, président de la Capeb, précise : « Nous avions entamé les travaux nécessaires à la définition des contours d’une alternative à la REP. Nous comptions proposer une organisation adaptée aux spécificités des différents types de déchets et leurs filières et soutenir la mise en place d’un système de traçabilité pour tous les acteurs. Il est indispensable que le système envisagé n’accroisse pas considérablement les coûts de la construction, à l’heure où la croissance de l’activité du bâtiment a largement ralenti en 2019. L’Assemblée et le Gouvernement nous coupent l’herbe sous le pied en actant la mise en place d’un système plus contraignant sans avoir procéder à une étude d’impact économique pour nos entreprises ! »
La traçabilité des déchets : une nécessité approuvée par la Capeb
La Capeb a été entendue par les députés de la majorité, suite à des dispositions contraignantes et totalement inopérantes au Sénat dans l’article 12, qui imposaient au chef d’entreprise la délivrance systématique à ses clients d’un certificat pour le tri et le dépôt des déchets correspondants a leurs chantiers. Cette contrainte a été supprimée lors de l’examen à l’Assemblée qui a assortie ces dispositions des précisions suivantes :
- « Les devis relatifs aux travaux de construction, de rénovation et de démolition de bâtiments ainsi que les devis relatifs aux travaux de jardinage mentionnent les modalités d’enlèvement et de gestion des déchets générés par les travaux ainsi que les coûts associés. Ils précisent notamment les installations dans lesquelles il est prévu que ces déchets soient collectés. »
- « La personne en charge de l’installation de collecte des déchets est tenue de délivrer à titre gracieux à l’entreprise ayant réalisé les travaux un bordereau de dépôt précisant l’origine, la nature et la quantité des déchets collectés. »
- « L’entreprise ayant réalisé les travaux mentionnés doit pouvoir prouver la traçabilité des déchets issus des chantiers dont elle a la charge en conservant les bordereaux délivrés par l’installation de collecte des déchets. L’entreprise ayant réalisé les travaux transmet les bordereaux au commanditaire des travaux ou à l’autorité compétente mentionnée à l’article L. 541-3, à la demande de ceux-ci. »
Sur ce dernier point, Patrick Liébus rappelle que la Capeb avait expliqué aux parlementaires que l’obligation pour les chefs d’entreprise, de donner systématiquement à chacun de leurs clients, le bordereau de dépôt des déchets de leur chantier était non seulement contraignant mais aussi contraire aux pratiques des entreprises qui ne vont pas systématiquement à la déchèterie à la fin de chaque chantier. L’Assemblée nationale a finalement entendu nos préoccupations en demandant aux entreprises de donner le bordereau de dépôt des déchets, seulement aux clients qui leur demanderont.
Un maillage territorial nécessaire pour lutter contre les dépôts sauvages
Un certain nombre de dispositions ont été adoptées par les parlementaires pour lutter contre les dépôts sauvages. Celles-ci prévoient un renforcement des pouvoirs de police du maire : le texte prévoit notamment l’exécution immédiate d’amendes administratives prononcées par les maires pour sanctionner les dépôts sauvages. Le temps d’intervention du Préfet sera également raccourci. La Capeb rappelle toutefois que ni la mise en place d’une REP, ni la reprise gratuite des déchets triés n’élimineront les décharges sauvages qui ne sont pas dus qu’au bâtiment et imputables aux entreprises uniquement.
Tout au long des débats, au Sénat comme à l’Assemblée, la Capeb a rappelé aux parlementaires la nécessité impérieuse de mettre en place un maillage territorial suffisamment fin des déchetteries acceptant les entreprises artisanales (à moins de 30 minutes). C’est pour la Capeb un enjeu majeur.
En conclusion, le seul espoir d’arriver à un peu plus de « souplesse » dans la mise en place de la REP résidera dans le contenu de l’étude de préfiguration de l’ADEME que lui a commandé l’État et qui vient tout juste de débuter et l’attention que portera le Ministère à ses conclusions.