En écho au projet de loi Retraite qui sera examiné à partir du 2 mars au Sénat, Jean-Christophe Repon, président de la Capeb, publie une tribune où il appelle à ne pas supprimer le statut de conjoint collaborateur. Une mesure qui passe actuellement inaperçue, mais aux répercussions (retraite, protection sociale, représentation dans les instances) importantes pour les personnes concernées, notamment pour les femmes (qui occupent principalement ce statut). A l’approche de la Journée internationale des droits des femmes, c’est un énorme retour en arrière qui serait instauré !
Et si la réforme des retraites constituait une opportunité pour renforcer les droits sociaux des femmes de l’artisanat du bâtiment ?
Depuis le 1er janvier 2022, la protection sociale obligatoire dont bénéficient aujourd’hui les conjoints collaborateurs, représentés en très grande majorité par des femmes, a perdu son caractère immuable. Une disposition de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2022 est venue limiter l’exercice de ce statut à cinq ans. Au-delà de cette durée, le conjoint collaborateur n’aura d’autre choix que de continuer son activité sous le statut de salarié ou le statut d’associé. Or, le statut de conjoint collaborateur, créé par la loi du 10 juillet 1982 et complété par la loi du 2 août 2005, avait permis de reconnaître l’activité non rémunérée du conjoint collaborateur, en officialisant son implication dans l’activité de l’entreprise et en lui faisant bénéficier d’un statut et d’une couverture sociale obligatoire. Par conséquent, pour la Capeb qui avait porté à l’époque cette avancée, limiter ce statut à cinq ans et contraindre le conjoint collaborateur à prendre un autre statut, que ce soit celui de salarié ou d’associé, ouvrent la porte à la grave dérive que constitue le retour au travail dissimulé, plaçant les conjoints collaborateurs dans une situation de précarité sociale intenable. Sans compter l’iniquité par rapport aux hommes, les femmes occupant majoritairement ce statut. C’est aussi porter atteinte à la liberté d’entreprendre et compromettre la viabilité économique des entreprises. Est-ce ainsi que la France voit son dynamisme entrepreneurial ? Est-ce ainsi que la France envisage la place des femmes dans son économie ? Mesdames et Messieurs les Sénateurs, saisissez-vous de l’examen du projet de réforme des retraites pour réparer les effets de régression et d’injustice de cette disposition, en offrant aux conjoints collaborateurs une meilleure protection sociale. Une mesure qui serait la bienvenue dans une réforme qui, une fois de plus, met en évidence des carrières professionnelles chez les femmes plus heurtées, avec des périodes non cotisées et des salaires plus faibles. Permettez ainsi aux conjoints collaborateurs de conserver ce statut dès lors qu’ils cotiseraient pour des droits sociaux au titre de l’Assurance vieillesse plus importants (sur la base d’assiette sociale égale aux trois quarts du plafond de la Sécurité sociale). Pour la Capeb, cette mesure serait une réponse à toutes celles et ceux qui souhaitent continuer à bénéficier de ce statut et dont la collaboration à la vie de l’entreprise constitue un choix de vie et s’avère indispensable à la pérennité économique de l’entreprise. Plus largement, et ce n’est pas un détail à l’heure où la parité dans les instances de gouvernance constitue un enjeu primordial, cette mesure permettrait aux femmes de pouvoir continuer à siéger dans les instances où la parité est désormais obligatoire (chambres de métiers, Caisses nationales de sécurité sociale.). Si elles venaient à devoir changer de statut, elles perdraient, en effet, la possibilité de siéger dans ces instances. Lutter contre les a priori et encourager les femmes à prendre pleinement part dans la vie de leur entreprise est un combat de tous les instants, la reconnaissance et le maintien du statut de conjoint collaborateur en fait pleinement partie.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs, les femmes de l’artisanat du bâtiment en appellent à votre bon sens !