Les chiffres de l’activité des entreprises artisanales du bâtiment au troisième trimestre 2022 le confirment, la tension sur les prix et les difficultés d’approvisionnement perdurent et affectent tous les corps de métier. Cette tendance est amenée à se poursuivre en 2023.
Ce contexte, qui plonge les entreprises artisanales du bâtiment dans une situation d’imprévisibilité inédite, menace la croissance du secteur dans son ensemble. Pour préserver le niveau d’activité de la filière, la Capeb avait lancé, en avril dernier, un appel à la solidarité économique aux acteurs de la filière. A l’époque, huit industriels et distributeurs1 avaient répondu présents. Aujourd’hui, 24 partenaires² les rejoignent pour s’engager aux côtés des entreprises artisanales du bâtiment et faire face ensemble à cette crise sans précédent.
Jean-Christophe Repon, président de la Capeb : « Le marché ne pourra pas continuer à subir des hausses de coûts des matières premières telles que nous le vivons aujourd’hui et les prévisions indiquent que la situation ne va pas s’améliorer en 2023. Nous devons impérativement agir collectivement pour limiter au plus juste l’impact de la hausse du coût des matériaux. Nous nous félicitons aujourd’hui de la décision des acteurs de s’engager dans une démarche de solidarité économique au sein de la filière. Elle est pour nous essentielle si nous voulons parvenir à maintenir l’activité et accélérer la contribution du secteur à la transition énergétique. »
Les conséquences des hausses s’accentuent
Depuis plusieurs mois, la Capeb ne cesse de faire part de son inquiétude quant à la hausse continue du prix des matériaux et son impact significatif sur l’activité des petites entreprises du bâtiment. Pour ce troisième trimestre 2022, les conséquences de ces hausses s’accentuent. La croissance de leur activité ralentit, passant de 3 % à 2 % en volume alors que le contexte de prix des matériaux demeure très dégradé, et que la crise énergétique pèse de plus en plus lourdement sur les entreprises artisanales qui font état de besoin en trésorerie important (15 % des entreprises déclarent des besoins de trésorerie, pour un montant moyen de 22 000€) et d’une détérioration de leurs marges (solde d’opinion à – 39 points, avec 42 % des entreprises rapportant une baisse de leurs marges). Les difficultés que rencontrent les entreprises artisanales du bâtiment ont nécessairement des répercussions dommageables pour l’ensemble de la filière du bâtiment, car, rappelons-le, elles représentent 95 % des entreprises de la branche.
Ainsi, Frans Bonhomme, Knauf Insulation, Würth, Wienerberger, rejoignent le rang des signataires de de la déclaration commune, initiée par la Capeb en avril dernier (texte ci-dessous). La Capeb note également, avec satisfaction, l’engagement renouvelé de Saint Gobain Distribution Bâtiment France et de ses sociétés associées (POINT.P, Cedeo et Brossette, La Plateforme du Bâtiment, PUM Plastiques, Asturienne, SFIC, Dispano, Décocéram, CDL Elec), ainsi que la confirmation de l’engagement du Groupe Herige et de ses trois sociétés (VM, Atlantem, Edycem), de Weber, d’Isover, de Placo, de Pladur, de l’ORCAB, sur les engagements ci-dessous :
- informer au préalable leur client des hausses de prix ;
- émettre des devis valables au moins un mois (hors produits à court) ;
- augmenter leur prix seulement le 1er de chaque mois.
« Autant d’engagements, pris dans le cadre d’une démarche inter-filière inédite, qui sont très encourageants afin que la filière dans son ensemble et les entreprises artisanales du bâtiment que je représente parviennent à sortir par le haut de la crise que nous traversons. Nous continuerons à porter cette voix dans d’autres hémicycles, tels que l’Assemblée nationale » Jean-Christophe Repon, président de la Capeb.
DÉCLARATION COMMUNE
En réponse à une demande exprimée par plusieurs acteurs du bâtiment et des travaux publics, les pouvoirs publics ont mis en place, au cours du 1er trimestre 2021, un comité de crise du BTP qui a permis, en particulier, de mobiliser et d’inciter fortement les acheteurs publics à faire preuve de compréhension et de souplesse dans l’application des règles des marchés publics (intégration systématique de clause de révision et sur la base d’index adaptés, non application des pénalités de retard en cas de difficultés d’approvisionnement, réduction du délai de publication des index BT de révision, etc.).
Or, en dépit des prévisions, les hausses des prix et les difficultés d’approvisionnement perdurent en 2022, voire se renforcent, et restent totalement imprévisibles pour les entreprises. Nombre d’enseignes et d’industriels se refusant même à s’engager désormais sur les prix et les délais de livraison.
Pire, aux hausses découlant de la crise sanitaire, s’ajoutent désormais les hausses des coûts de l’énergie et des matières premières liées à la guerre en Ukraine qui amplifie ces hausses sans oublier le coût de certains composants électroniques et le coût de la décarbonation des process de production et de fabrication, dont les justifications mériteraient souvent d’être plus transparentes.
Cette situation est particulièrement inquiétante car le marché ne pourra continuer à subir des hausses de coûts aussi importantes. Si rien ne change, ces hausses brutales mettront, à court terme, en péril l’activité du secteur du bâtiment.
Le Premier ministre vient de présenter, dans le cadre du Plan de Résilience Economiques et Sociale, un certain nombre de dispositions pour atténuer les impacts de la crise (hausse des coûts des matières premières, de l’énergie et difficultés d’approvisionnement) sur les entreprises.
Pour les signataires de la présente déclaration, les dispositions du plan de Résilience Economiques et Sociale sont insuffisantes face à la situation que connaît le secteur du bâtiment.
En acteurs responsables, et compte tenu de l’ampleur de la situation, les signataires considèrent comme impératif d’être solidaires et qu’il est nécessaire de faire front ensemble pour préserver le niveau d’activité dans le bâtiment.
Indépendamment des revendications que chaque signataire de la présente déclaration commune peut porter pour défendre ses intérêts propres, les signataires s’engagent collectivement :
1 – Pour les signataires industriels et fabricants de matériels ou d’équipements
- à participer activement au Comité de crise du BTP mis en place par le gouvernement ;
- à intégrer dans leurs prix le juste coût de la hausse des coûts de l’énergie et/ou des matières premières et/ou des composants électroniques et/ou résultant de la décarbonation des process de production ;
- à maintenir les mêmes prix, au moins sur une durée de 60 jours ;
- à prévenir suffisamment tôt les négoces / distributeurs/ entreprises de toute future hausse des prix ;
- à répercuter dans les meilleurs délais les baisses constatées au niveau des coûts de l’énergie et/ou des matières premières et/ou des composants électroniques ;
2 – Pour les signataires négoces et distributeurs de matériaux et d’équipements
- à participer activement au Comité de crise du BTP mis en place par le gouvernement ;
- à s’assurer auprès de leurs fournisseurs qu’ils intègrent bien, dans leurs prix, le juste coût de la hausse des coûts de l’énergie et/ou des matières premières et/ou des composants électroniques et/ou résultant de la décarbonation des process de production ;
- à maintenir les mêmes prix, au moins sur une durée de 60 jours, sauf cas exceptionnel ;
- à ne pas appliquer, dans la mesure du possible, les hausses sur les stocks ;
- à prévenir ses clients, dans un délai maximum de 8 jours, de toute augmentation confirmée d’un fournisseur (mail, courrier ou site internet) ;
- à répercuter dans les meilleurs délais le juste coût des baisses, une fois les stocks écoulés ;
3 – Pour la Capeb
- à participer activement au Comité de crise du BTP mis en place par le gouvernement ;
- à accompagner les entreprises sur le terrain pour faire acte de pédagogie et d’explications auprès de leurs clients pour justifier les hausses des coûts ;
- à inciter les entreprises adhérentes à la Capeb à limiter au maximum la durée de validité de leur devis, à introduire, dès que possible, des clauses de révision de prix dans leurs marchés, y compris dans les marchés privés et à détailler précisément et suffisamment leurs devis ;
- à accompagner les entreprises dans leur gestion d’entreprise pour faire face aux crises qui se succèdent désormais ;
- à alerter les entreprises sur la nécessité de veiller particulièrement à la bonne détermination de leur prix de revient, et à leurs actualisations régulières, pour s’interdire de travailler à perte.