Nous sommes allés rendre visite à Frédéric Fortuné, un artisan peintre singulier mais aussi artiste, apprécié pour ses œuvres rendant hommage au corps féminin. Rencontre avec un passionné d’art qui transforme tout ce qu’il touche en or !

Héritier de l’entreprise de peinture créée par son grand-père en 1936 à Nice (Alpes-Maritimes) et transmise par son père, Frédéric Fortuné a su préserver le savoir-faire de son métier et cultiver la créativité artistique familiale. À 59 ans, il partage aujourd’hui son temps sur les chantiers, durant la semaine, avec Julien, son fils aîné de 31 ans, et travaille sur ses œuvres les soirs et les week-ends.
Une inspiration partie des sinistres
L’histoire de Frédéric Fortuné commence lorsqu’il intègre l’entreprise de son père après son CAP. Disposant d’une appétence pour la tenture murale, il propose ses services en qualité de stagiaire non rémunéré à des entreprises pour apprendre la technique. Il assure, en parallèle, son activité dans l’entreprise familiale et ses stages lui permettant d’apporter ce savoir-faire complémentaire à celle-ci. Quelques années plus tard, l’artisan s’intéresse aux plafonds tendus. Il obtient l’agrément de poseur et intègre cette nouvelle activité dans ses prestations.

« Après avoir ajouté les plafonds tendus au catalogue de notre entreprise, il m’est arrivé de faire des devis pour des logements ayant subi des sinistres comme des dégâts des eaux », raconte l’artisan. « Durant les visites nécessaires aux évaluations des coûts des travaux, mon âme d’artiste s’émerveillait en découvrant les formes que prenaient les plafonds tendus par le poids de l’eau. Mon inspiration est partie des sinistres. Je trouvais les déformations si belles qu’elles m’ont donné l’envie de créer des œuvres », révèle-t-il.
Un premier prix de sculpture
L’artisan se lance alors dans l’apprentissage de la sculpture. « Pendant quatre ans, j’ai appris à sculpter l’argile et le plâtre », poursuit l’artiste. « Dès la première année, j’ai réalisé des essais parmi lesquels j’ai très vite utilisé la toile des plafonds tendus, en enfermant mes œuvres derrière elle. Avide de découvrir de nouvelles techniques et véritablement inspiré, durant cette formation j’ai été particulièrement productif », se souvient-il. Il stocke alors ses œuvres dans son logement et chez ses parents, mais très vite la place vient à manquer. Face à ces sculptures envahissantes, son épouse lui suggère de les vendre.

« Au début, je ne voulais pas m’en séparer car je considérais mes essais comme un travail de recherche, mais je me suis laissé convaincre par la curiosité d’être confronté au regard du public. Ma femme a très vite fait le nécessaire. J’ai participé à une exposition grâce à laquelle j’ai obtenu le premier prix de sculpture décerné par l’Académie européenne des arts, que la ville de Nice m’a remis », raconte-t-il.
Des sculptures en cuivre dans un bain d’or

Si Frédéric Fortuné n’a rien vendu lors de sa première exposition, la distinction obtenue l’a conforté dans l’envie de poursuivre ses créations qui magnifient le corps féminin – même s’il arrive à l’artiste de travailler sur le corps masculin. « Si à l’époque j’exploitais l’argile et le plâtre pour mes sculptures, j’utilisais aussi la résine pour faire des inclusions métalliques. J’allais chez les récupérateurs de métaux pour collecter des compressions en métal. Mon travail du cuivre vient de là. Un jour, d’une poignée de cuivre récupérée, j’ai fait mon premier visage avec ces carrés fabriqués dans ce matériau. De 2004 à 2015, j’ai passé tout mon temps à perfectionner ma technique avec différents matériaux et notamment le cuivre qui est devenu ma matière première de prédilection pour les œuvres que je réalise. J’ai développé une technique de soudage pour obtenir le résultat que je souhaitais. Aujourd’hui, je maîtrise ma technique en constituant une structure en cuivre soudé à l’étain. Au départ, je travaillais le cuivre brut et j’utilisais un vernis ou je faisais tremper mes œuvres dans un bain de nickel pour la finition. Depuis quatre ans, je propose des sculptures en cuivre, plongées dans un bain d’or fin 24 carats. »
Et, de conclure : « Aujourd’hui, ma notoriété me précède. Grâce à elle, il m’arrive de faire des collaborations comme, dans ma région, la Maison Armand pour laquelle j’ai créé des couronnes pour l’Épiphanie et des œufs de Pâques. J’ai aussi eu le plaisir de réaliser les trophées 2024 pour l’évènement annuel organisé par la Capeb des Alpes-Maritimes où je suis adhérent. »
Thomas Peixoto