L’autoconsommation et l’autoproduction solaires décolleront-elles dans les années à venir en France ? Les représentants de la filière veulent l’espérer, mais ont fait part de leur scepticisme. Lors de l’ouverture de l’université d’été organisée les 5 et 6 septembre sur ce thème par le syndicat Enerplan, son président Daniel Bour s’est estimé « désabusé » face au retard du marché tricolore. Dans son discours d’introduction mercredi 5, il a rappelé d’abord que la France ne compte aujourd’hui que 28 000 installations autoconsommatrices, contre 20 000 l’an dernier.
La progression est donc très, voire trop timide d’une année sur l’autre. « Notre retard par rapport à nos voisins s’accentue : nous autoconsommons 100 fois moins que les Italiens et 33 fois moins que les Allemands, a expliqué Daniel Bour. 1,5 % de l’électricité italienne est autoconsommée : c’est l’équivalent de la part de la totalité de la production solaire dans le mix français. » Un retard d’autant plus dommageable au regard d’Enerplan que l’autoconsommation est un sujet majeur d’actualité qui concerne l’ensemble des Français, dans leur grande majorité favorables à cette énergie.
Pourquoi la France accuse-t-elle ce retard dans l’autoconsommation ? Car « en France, le prix de l’électricité pour le particulier est sensiblement plus bas que dans les autres pays européens. Mais cela ne saurait expliquer l’ampleur de notre retard, pour lequel on peut distinguer au moins trois causes profondes :
• en raison de ses nombreuses barrières encore présentes, le système n’a pas permis jusqu’à présent de libérer l’autoconsommation. Les syndicats ont aussi leur part de responsabilité : nous n’avons pas encore réussi à faire évoluer les Pouvoirs publics sur la levée d’un certain nombre de ces obstacles ;
• par un réflexe très français, on commence par mettre en place des instruments de contrôle et des freins avant même que le marché de l’autoconsommation n’ait réellement démarré ;
• les quelques avancées obtenues sont souvent compensées par des pas de côté et des pas en arrière, de sorte que nous faisons du surplace. »
Et, Daniel Bour, d’émailler son propos de quelques exemples à l’instar du plan mis en œuvre par Sébastien Lecornu « Place au soleil » qui comportait deux avancées majeures : la reconnaissance de l’autoconsommation collective et du statut de tiers-investisseur.
Et, de reprendre : « En précisant l’interprétation de la notion de « tiers-investisseur », les Pouvoirs publics nous ont fait faire un pas de côté : il a ainsi été indiqué que la notion de tiers-investisseur s’entend au sens du Code de l’énergie, pas au sens fiscal. Le tiers-investisseur ne bénéficiera donc pas des avantages et exonérations prévues, notamment sur la CSPE. Et, à peu près au même moment, la CRE nous a entrainés dans un pas en arrière avec deux décisions très dommageables : la publication d’un TURPE Autoconsommation très dissuasif et l’épisode du dernier appel d’offres autoconsommation sur lequel la CRE a décidé ne n’allouer que 2 MW de projets sur les 50 prévus initialement, sous prétexte que l’intégralité du volume n’avait pas été souscrit et que le prix moyen des lauréats remontait par rapport à la session précédente. L’ironie de cette situation est que la remontée du prix résultait précisément de l’incertitude dans laquelle baignent les professionnels quant à la fiscalité à laquelle leurs projets seront soumis ! Le marché de l’autoconsommation pourrait être en forte croissance, et pourtant il reste bloqué. C’est inacceptable. »
Nous reviendrons plus amplement sur ce dossier et cette université d’été lors de notre prochaine édition de novembre.